Le Centre suisse de coordination pour la recherche en éducation (CSRE) a publié les derniers résultats de l'enquête «La numérisation dans l'éducation en Suisse». Stefan Wolter, directeur du CSRE, explique dans un entretien (en allemand) avec Tobias Schlegel quelles lacunes de données cette enquête permet de combler et à quoi ressemblent les résultats de la quatrième enquête. Les résultats fournissent également des données chiffrées pour les discussions actuelles autour de l'utilisation des smartphones à l'école ou du risque de distraction lors de l'utilisation de matériel pédagogique numérique en classe. Ces exemples montrent clairement que les données et leur utilisation sont essentielles pour prendre des décisions politiques basées sur des preuves.

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Vous trouverez les résultats actuels de l'enquête «La numérisation dans l'éducation en Suisse» dans le «Staff Paper 26» du CSRE.

Résumé du podcast en français

Stefan Wolter revient d'abord sur les origines de l'enquête. Celle-ci a été lancée pendant la pandémie de coronavirus, lorsque les écoles ont été fermées et que l'enseignement à distance a été mis en place. L'espoir était que la numérisation permettrait de maîtriser l'enseignement à distance. Le CSRE a toutefois constaté qu'il existait un grand manque de données à ce sujet suite à un appel téléphonique d'Elisabeth Baume-Schneider. Alors conseillère aux États, elle voulait savoir combien d'élèves possédaient un ordinateur et un accès à Internet à la maison. Le CSRE a dû constater que seuls des chiffres sporadiques issus des enquêtes PISA existaient à ce sujet – des données qui étaient loin de donner une image représentative de la numérisation de l'éducation. C'est notamment pour combler ce manque de données que l'enquête sur la numérisation dans l'éducation en Suisse a été lancée en 2020. Celle-ci utilise un échantillon de l'Office fédéral de la statistique comportant des ménages avec des enfants scolarisés de 8 à 18 ans. Avec un taux de réponse d'environ 60%, cela représente environ 6000 élèves participants par enquête. La particularité de l'enquête est que les questions sont posées du point de vue des élèves, c'est-à-dire des personnes concernées par la numérisation dans l'enseignement. L'enquête couvre les différents degrés scolaires (par ex. primaire et secondaire) et types d'écoles (par ex. gymnase et formation professionnelle) ainsi que régions linguistiques.

Conclusions de l'enquête

Stefan Wolter fait une distinction entre les résultats de la quatrième enquête et les conclusions qui peuvent être tirées de la comparaison dans le temps. La quatrième enquête est la première après l'arrivée de ChatGPT. Il était particulièrement intéressant de savoir si de tels outils d'intelligence artificielle (IA) étaient également utilisés à l'école et à la maison à des fins scolaires. La surprise est venue de la rapidité d'adaptation et de l'utilisation de l'IA à l'école. Stefan Wolter constate que «jamais une technologie n'a été aussi rapidement introduite dans le système éducatif». Les programmes de traduction sont utilisés par plus de 80% des élèves et les modèles linguistiques génératifs par jusqu'à 70% d'entre eux. Même dans le degré secondaire I, 50% des élèves utilisent des programmes de traduction chaque semaine, ce qui dépasse de loin les taux d'utilisation des employées et employés dans leur travail quotidien (environ 30%).

En ce qui concerne l'évolution au fil du temps, Stefan Wolter souligne surtout l'utilisation des outils numériques dans l'enseignement. D'une part, il apparaît que la pénétration des outils et dispositifs numériques à l'école a atteint un plafond. D'autre part, si l'on considère les régions linguistiques, la Suisse romande a rattrapé son retard par rapport à la Suisse alémanique dans ce domaine. Contrairement au Tessin, où les taux d'utilisation des outils numériques en classe restent plus faibles.

Ce que les conclusions nous apprennent

Du point de vue de l'utilisation des données, il est particulièrement intéressant de savoir ce que l'on peut apprendre des résultats de l'enquête. Stefan Wolter mentionne deux exemples qui peuvent fournir des informations importantes pour les discussions actuelles.

Le premier exemple concerne le débat intense qui a lieu depuis quelques mois sur l'utilisation des smartphones (et des médias sociaux) dans les écoles. Selon Stefan Wolter, le débat donne souvent l'impression que l'école est le lieu où l'utilisation des smartphones par les élèves peut être endiguée. Or, l'enquête montre, en particulier pour les élèves du primaire, que le smartphone n'est pratiquement pas utilisé en classe. Parallèlement, 80% des élèves du primaire ont accès à un smartphone à la maison ou possèdent leur propre appareil. Si l'on veut limiter l'utilisation des smartphones chez les enfants, il faudrait donc en premier lieu intervenir non pas à l'école, mais à la maison.

Le deuxième exemple fait référence à un projet politique suédois visant à bannir les outils numériques de l'école car ils ne favoriseraient pas le processus d'apprentissage. Un débat qui a également fait couler beaucoup d'encre en Suisse. Si l'on considère maintenant le point de vue subjectif des élèves à partir des résultats de l'enquête, on constate que les aspects positifs l'emportent sur toutes les vagues de l'enquête. 70% à 80% des élèves affirment avoir plus de plaisir à apprendre la matière avec des outils numériques. Même en ce qui concerne les effets négatifs potentiels tels que la fatigue ou les difficultés de concentration, l'enquête tend à dissiper les inquiétudes. Seuls 10% à 20% des élèves seraient d'accord avec de tels effets négatifs. Sur la base de ces deux exemples, Stefan Wolter conclut : «pour pouvoir mener de tels débats politiques en toute connaissance de cause, le système éducatif est tributaire de données telles que celles issues de l'enquête "La numérisation dans l'éducation en Suisse"».

Flux de données dans le système éducatif

Nous aussi, nous menons régulièrement des enquêtes. Actuellement, nous souhaitons savoir si vous avez des expériences avec les flux de données dans le système éducatif. Dans ce cas, nous serions ravis de votre participation à notre court sondage sur le sujet.

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